LES TRÉSORS INFINIS DU COEUR DE JÉSUS CHRIST

Voici la plus grande merveille Que j’aie exprimée en mes vers, Prédestiné, prête l’oreille Et mêle avec moi tes concerts.
Je m’élève par-dessus moi-même, je monte jusqu’aux bienheureux Et jusqu’au monarque suprême, Plus élevé que tous les cieux.
Que vois-je ? Tout le ciel admire, Tout le ciel en est étonné, Je vois ce que je ne puis dire, Viens contempler, prédestiné.
Anges, dites-moi, je vous prie ; Quel est ce beau brasier de feu ? C’est le Cœur du Fils de Marie Et du Fils unique de Dieu.
Mortel, adore avec les anges Ce Cœur qui doit être adoré, Publie et chante les louanges D’un Cœur que l’amour a navré.
O grand mystère de la gloire qu’on ne comprend point ici- bas ! Et qu’il faut de foi pour le croire, Quand un cœur ne le goûte pas !
Ce Cœur, dès que l’homme l’aborde, Elève Dieu son Créateur, Exalte sa miséricorde Et lui rend un parfait honneur.
Chose étonnante, il s’humilie Devant son Père, à tout moment ; Il loue, il adore, il supplie, Il parle pour nous puissamment.
O merveille tout ineffable ! Cœur plein de la divinité ! Cœur infiniment adorable, Dans la très sainte Trinité !
Oh ! que de flammes vers son Père Ce Cœur jette en haut nuit et jour ! Oh ! qu’il aime l’homme son frère D’un pur et d’un ardent amour !
O grand Cœur ! O fournaise ardente ! O brasier tout miraculeux Qui jette une flamme abondante Pour brûler la terre et les cieux !
Depuis qu’il est Cœur, il nous aime Sans cesser d’aimer un moment ; Il nous aime autant que lui-même, Avec excès, infiniment.
Il est le Cœur des cœurs sublimes, Le Cœur des vrais prédestinés, La plus grandes de leurs victimes Dont leurs péchés Sont pardonnés.
Dans ce Cœur, les plus saintes âmes, Les plus grands amis du Sauveur Ont puisé leurs plus pures flammes, Leur plus ineffable ferveur.
Voici le trésor véritable De la grâce de Jésus-Christ, Voici la fontaine admirable De tous les dons du Saint-Esprit.
C’est ici la source de vie En qui tous les saints ont puisé, C’est ici le bel incendie Dont le cœur était embrasé.
On trouve en ce Cœur toutes armes, Il en est le grand arsenal ; On trouve en lui les plus saints charmes Pour charmer et vaincre le mal.
Voici la plus sainte retraite Où l’on évite le péché, Où l’âme la plus imparfaite Devient très sainte à bon marché.
Voici la ville de refuge Où l’on n’est jamais outragé, Et la vraie arche du déluge Où l’on n’est jamais submergé.
C’est ce grand Cœur percé qui touche Et qui désarme un Dieu vengeur, Sa plaie est sa divine bouche Qui plaide et qui le rend vainqueur.
Jamais, dans ce Cœur, Dieu le Père N’a frappé le pauvre pécheur, Ce Cœur apaise sa colère, Obtient sa grâce et sa faveur.
Voici l’ouverture sacrée Du saint cabinet de l’Époux, Où l’âme pure est enivrée Du vin de l’amour le plus doux.
Dans ce Cœur, l’âme est embaumée De l’odeur des plus doux parfums, C’est en lui qu’elle est enflammée Des feux qui ne sont pas communs.
Ce Cœur est notre arche vivante Qui renferme toute la loi, Les secrets de l’âme innocente Et les mystères de la foi.
C’est en ce Cœur que notre Maître Forma tous ses secrets d’amour, Avant de les faire connaître, Avant de les produire au jour.
Son Cœur a formé ses oracles Avant qu’il les eût proférés, Son Cœur a formé ses miracles Avant qu’il les eût opérés.
En cette source de lumières, Les favoris de Jésus-Christ Ont puisé les plus hauts mystères, Les plus grands dons du Saint- Esprit.
C’est en ce trésor d’innocence Qu’ont été formés tous les saints, C’est en lui qu’ils ont pris naissance Et consommé tous leurs desseins.
Ce Cœur est le trou de la pierre Où l’on trouve une douce paix, C’est le paradis de la terre Où logent les hommes parfaits.
C’est en ce lit que reposent Les plus grands amis de Jésus, C’est par ce Cœur qu’ils se disposent A ses plus sublimes vertus.
O grand Cœur, ô profond abîme De la profonde humilité ! o grand Cœur, ô trône sublime De la parfaite charité.
O grand Cœur, miracle du monde Qui contient tout en vérité, Avec le ciel, la terre et l’onde, Toute la sainte Trinité !
En louant ce Cœur adorable, Je loue avec proportion Le Cœur de sa Mère admirable, Tant est grande leur union.
Ce n’est que vous seul que j’adore, Cœur de mon Dieu, Cœur glorieux, Mais, en vous adorant, j’honore Le Cœur de la Reine des Cieux.
Chrétien, par le Cœur de Marie On aime le cœur de Jésus, Puisque Jésus a pris la vie Dans ce Cœur et dans ses vertus.
Du sang de son cœur tout de flamme Le Cœur de Jésus est formé ; Ils n’ont qu’un cœur, ils n’ont qu’une âme, L’un et l’autre doit être aimé.
Ame, perdez-vous sans partage dans ces deux Cœurs miraculeux ; L’un avec l’autre vous engage A n’en voir qu’un seul dans les deux.
Chère âme, montez en cachette Par le Cœur tendre au Cœur très-haut. Vous deviendrez bientôt parfaite En aimant ce Cœur comme il faut.
DIEU SEUL.
Saint Louis Marie Grignion de Montfort, Cantique 40

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